Des joutes d'amour pour le Jour de Joutes

Bonjour aux amoureux des belles lettres,

Nous publions ici les réponses à des lettres datant de 1939, trouvées près du canal d'Arles à Bouc, et signées d'un Pierre.
Ces réponses fictives ont été rédigées par Brigitte Curdel.
Elles furent prétexte à un concours de lettres, poèmes et mots d'amour, reçus dans le cadre des "Joutes d'Amour" des Territoires Poétiques, qui avaient lieu en juin 2013.

mercredi 8 mai 2013

ô femme si mystérieusement poreuse



Si je réponds tardivement à ta lettre de 19 heures, Eva, c’est d’abord parce qu’il y a des lettres comme celle-là qu’il faut laisser se déposer en soi. Pour que l’eau de la rivière qui nous emporte soit claire. La précipitation dans la réponse peut montrer un élan, et ce n’est pas rien, mais elle peut aussi conduire à jouer au mikado avec des lieux communs. Pour l’élan, dont je ne pouvais me priver, je l’ai laissé paraître dans deux échos que tu as peut-être déjà vus dans la page que j’ai mise en ligne ce soir. Et quelle douce coïncidence de retrouver ton élan dans la saisissante photo qu’accompagnent ces mots, “ce matin j'aurais dû être baleine, Gadenne”, des mots auxquels plusieurs sens peuvent être donnés – et j’en ai choisi un qui me remplit d’une désirante tendresse.
Quant à ta lettre, j’en entends tout, oui tout – et sinon je te le dirais car cela fait partie de notre complicité – en même temps qu’il me semble entendre les bruissements du non-dit. Ce qu’il m’importe alors de te dire, ô femme si mystérieusement poreuse, c’est que je ne suis pas disposé à “tarir la source avant l’heure”. Tu es entrée dans ma vie comme ces feuilles ailées sur le dessin que je t’ai envoyé. Il n’y a eu ni préméditation ni perspective dans ces phrases par lesquelles nous avons commencé à nous déployer l’un pour l’autre. C’est pour moi une aventure intérieure partagée et cela doit le rester. Personne ne doit ni s’interroger sur ni pâtir de ce que nous avons commencé à échanger. C’est à cette condition que nous pourrons, comme je t’en disais l’envie ce matin, nous écrire, nous voir, nous parler sans gêne ni déguisement, au gré des désirs pourvu qu’ils soient partagés.
 J’aimerais que tu puisses lire ces quelques lignes avant de t’endormir. Pour que rien de ce qui s’est mis à circuler entre toi et moi n’aille troubler ton sommeil. Je t’embrasse comme si je pouvais à l’instant te caresser de la plus musicale manière.

Jules Varen

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire